J'ai pas de réponse. Je me rends bien compte que j'ai pas réussi à atteindre exactement le point le plus haut de la courbe. Que ma trajectoire n'est pas toujours parvenue à continuer belle et sereine vers l'avenir, que j'ai mis un grand coup de frein à ma progression un jour il y a quelques temps, je ne sais même plus exactement pourquoi. On peut peut-être pas vraiment dire que j'ai enclenché la marche arrière, mais ce qui est sûr, c'est que de la cinquième j'ai rétrogradé en première. Je parle de bagnoles comme si je savais conduire, c'est peut-être la faute à Drive, ou bien c'est juste que j'attends toujours mon enlèvement au bord d'un trottoir.
Peut-être que c'est pas la vitesse à laquelle on traverse la vie qui importe, pas plus que ne compte vraiment la longueur de la route. Je me souviens que cet hiver j'avais trouvé dans une papillote une citation de Sénèque, qui disait quelque chose comme "la vie est un conte, ce qui est important ce n'est pas sa longueur mais sa valeur", et je l'avais collée dans mon carnet bleu comme une conclusion à toutes les conneries que j'avais pu écrire auparavant. Ce qui était une erreur de ma part, car plus qu'un point final c'était le début d'une nouvelle vérité.
Parfois j'ai l'impression que la vie ressemble au métro. Tu t'engouffres dans un tunnel noir, et quand tu ressors, rien n'est jamais exactement pareil, le paysage n'est plus le même, les personnes marchent d'un pas différent, la nuit est tombée, ou bien le soleil est sorti de derrière les nuages.
Quoiqu'il en soit tu es revenue à la surface de la terre.
Ça me manque je crois.
" - Je n'ai pas d'amis, répondit-il. Et s'il m'en reste encore quelques-uns, c'est pour peu de temps.
- Pourtant ils sont dehors et montent la garde pour qu'on ne vous tue pas, dit-elle."
Gabriel Garcia Marquez, Le Général dans son labyrinthe.
à 20:35